mercredi 21 octobre 2015

Le retour des couilles ( idées décoiffées )


Le roi Penga

Le nom est Penga.
Mon nom est Penga.
C’est le nom de la dynastie des Pengas que mon arrière, arrière-grand-père Daragoch fonda, en été, de cette année, lointaine et inoubliée et marquée par de longs mois de terrible canicule, sans un nuage à l ’ horizon, sans une goutte de pluie du ciel. La famine s’installa, même les rapaces n’avaient plus de force, ni d’espoir pour survoler leurs proies. Les bergers mouraient avant de pousser leurs maigres troupeaux jusqu’au bord des rares champs, au pied des collines, avec encore un peu de l’herbe asséchée.
Daragoche Penga prit, alors son violon, se tourna vers sa femme et dit :
Viens, femme. Prépare les gosses, on part chercher de la pluie.
Pendant des semaines, pendant des mois, en traversant les villes et les villages, en avançant le long des rivières sèches, en entrant pour les seuls courts repos, chez les gens et dans les églises, il marchait et jouait de son violon. A la fin de sa longue route, après des mois de jours et de nuits de jouer au violon, après avoir perdu quatre de ses six enfants, mon arrière, arrière-grand-père remmena la pluie sur les champs et sur les toits des maisons des hommes. Il est mort le jour où, on l’a proclamé roi de La Daccie et de la Vallacie.
Je suis le dernier rejeton de cette noble famille, le seul descendant mâle authentique. A la date du 16 janvier 1941, mon grand-père fut trouvé mort à côté des voies ferrées, après avoir sauté avec sa femme dans ses bras du train qui se dirigeait vers un camp de travail ou de la mort, ou de travail qui libère jusqu’à la mort. Ma grand-mère, grièvement blessée et prise de convulsions accoucha avant terme et mourut, sa tête sur le torse de son mari, déjà sans vie. C’est un chien qui trouva mon père et en aboyant attira l’attention de son maître. Toute sa vie, mon père garda le souvenir de l’odeur et de la chaleur de l’herbe et des plumes des oies que la femme de cet homme, un musicien hongrois lui faisait comme couveuse.
Je joue aussi, du violon. Je m’appelle Vital Penga. Mais aujourd’hui, je ne jouerai pas, aujourd’hui c’est mon couronnement. Je dois me reposer un peu, pour être frais pour le moment où, on me dit :
Vital Penga, c’est le 2 septembre 2013, voilà le moment, oh notre Roi ! , à porter cette couronne, oh roy de la Daccie et da la Vallacie.
Vital, Vital, mon ami Sedi me secouait, réveille - toi, bon sang. Ils sont venus, ils nous chassent. La police casse les caravanes. Viens on se sauve ! Viens on se cache ! Tu sais bien que les gens ici, ici aussi comme ailleurs ne veulent pas de nous ! Allez ! Prends ton violon  et cours !


Flou de rage


La secrétaire me regarde, regarde son agenda :
  • Vous êtes l'auteur de ''Les lettres à Flo''.
  • Yes.
  • Comment orthographiez-vous iesse, non, pardon, vous pouvez répéter votre réponse ?
  • Oui ! La réponse est oui !
  • Donc vous en êtes l’auteur. Flo (Phlau, Flot), comment orthographiez-vous, s'il vous plaît ?
  • F comme Silvana Mantopulis Clara y Casta, la fille !
  • Merci, vous patientez et le rédacteur vous recevra sous peu, merci.
    Le bureau du Décideur est grand, agréable, ensoleillé. Le Décideur est petit, désagréable et sombre. Il ne m'invite pas de prendre place en face de lui alors je reste debout mais devant lui, quand même. Il me tend mon manuscrit.
  • C’est flou !
  • Flo?
  • C’est flou.
  • Flo ?
  • Notre comité de lecture l'a lu, une pause pour me laisser du temps pour mes remerciements muets, oui, nous avons lu, un regard vers le haut annonçant une suite décisive pour mon avenir d’écrivain, mon avenir tout court. C’est flou !
  • Flo?
  • C’est flou !
  • Flou Flo ? Flo flou ? C’est Fou !!
  • Flou, flou !
  • Avez-vous, vraiment lou ?
  • Nous avons lu ! C’est flou ! Nous avons une ligne éditoriale ! Une ligne éditoriale qui est une tangente du code du Cercle Rond Rouge des poètes comme tels perçus … Le même code est proposé, discuté et retenu par le bureau Collegium Fidelis Copinarum dont les membres sont élus parmi les auteurs du Cercle Rond Rouge. Nous pouvons avancer, sans aucune fausse modestie d'avoir constitué un ''Cercle des Poètes comme tels perçus '' et que ce Cercle Rond
  • Rouge ?
  • C’est flou chez vous !
  • Chez Flo ? Flou ?
  • Chez vous ! Nous voulons des auteurs de talent. Qui ont du vécu, les auteurs qui savent transmettre ce vécu aux lecteurs par une narration intelligente. Sans vouloir vous offenser, je crains que vous ne puissiez pas entrer dans notre Cercle Rond Rouge. Nous ne pouvons pas nous permettre des expériences. Nous n'avons pas de garanties que vous pouvez décrire votre vécu tout en supposant que vous en avez un.
  • Mais votre analyse est floue. C’est clair, c'est flou ! C’est fou ! Je n’ai pas de vécu ? Mais mon vécu est plus fort qu’une vie molle de vos poètes mourant en permanence dans les salons des retraités de la culture. Je suis le géant qui tire derrière lui la montagne sous laquelle coule la rivière de sa naissance. Mon vécu n’a pas été éjaculé en branlette pour vivre dans une éprouvette de votre Circus rond rouge. Mon vécu n'est pas une description. Mon vécu c’est de la bouche plaine de la terre avec le goût et l’odeur des promesses. J'ai connu la peur et le choque et la honte d'un survécu quand la mort massacre les enfants à côté de toi. Mon vécu c’est la couleur des rouges à lèvres des vierges et des putes, c’est le gout salé du sang, c’est partir à l'aube à côté de Pedro dans sa vieille ‘’chevy’’ pour aller passer une nuit avec Maria Dolores à l'autre bout du désert porto-ricain. J'ai fait du stop sur 5 000 km pour aller faire bouclier humain sur les ponts cibles militaires dans les Balkans … j'ai affronté le terrible Ukrainien Popetchenko dans un match de box en 15 rounds pour gagner 15 dollars par le round et 5 dollars par knock-down. J'ai été un loup parmi les hommes chassant les loups. J'ai osé sonner à la porte de mon proprio à trois heures du matin et réclamer trois morceaux du sucre, avec trois mois de retard de loyer … non, je rigole, j'avais payé, enfin j'ai voulu payer...
    Il n'a pas réagi, il n'a, certainement pas compris ou bien je n’ai rien dit. Faux, il avait la trouille. Je fais le tour et m'assoie sur le bureau de son côte. Il avait l'air perdu.
  • Un très grand écrivain a dit qu'il était plus difficile de trouver un bon lecteur qu'un bon auteur. Eh ban, c'est faux, le lecteur n'existe plus, il est parti, il est mort, il n'y a plus que la lectrice et la lectrice semble friande d’amour. Alors oublie les foutaises que je viens de te dire, je t’écrirai une magnifique histoire de 650 pages pure love. Ok ? T'es pas convaincu ? T'a raison, faut dire : elle est triste, quand elle est triste, faut dire il l'aime de tout son cœur tout les deux pages pour rassurer les lectrices. Je n’écris pas pour faire chialer une ménagère, je lui propose le suicide assisté si elle osera aller à la dernière page. Bon, bon, je déconne, elle restera en vie, votre cliente, ma lectrice. Et mon affaire c’est flou ?
  • C’est flou !
  • Flo ?
  • Flou !
    Je me lève. J'ai pris mon texte et suis sorti.
  • Alors, c’était comment !
  • Claire ! Il nous trouve flous !
  • Flou ?
  • Oui. Que faire ?
  • Rien, viens on s’en va.
  • Et c’est tout ? Flo, c’est tout ?
  • Non, elle sourit, on s’en va … mais tu continues.
    Je ne dis rien ! Je lui tends mon bras. Florence prend ma main.
  • Parle-moi de ton prochain roman.
  • C’est encore un peu flou, Flo.





Donc


Assis à côté de la belle fille, belle parce que joli visage, gros nichons, fesses fermes et non belle fille parce que mariée à son fils, qu'il n'a pas d'ailleurs, Arthur se taisait. Sa fille aussi. La belle fille était sa fille. Et belle.
Tu m'écoutes ? dit le père.
On peut dire, maintenant qu'ils ne se taisaient plus, même si la fille n'a rien dit. Elle se taisait toujours, donc. Faire du pluriel où il n'y a que le singulier qui rompt le silence c'est bizarre, mais bon.
La mère mit la marmite à côté de quelque chose. On verra par la suite que ce quelque chose était pauvre. Enfin, on le verra tout de suite et non par la suite, quoique c'est, un peu, par la suite aussi vu que ça se lit après qu'on l'avait dit, par la suite, donc. Arthur se tourna vers sa mère, la mère de sa fille et non vers sa propre mère, laquelle était absente d'ailleurs. Et morte.
Donc, dit-il à sa femme, sa propre femme, bien évidement puisque sa fille n'avait pas de femme, elle l'était.
Donc, dit-il, la pauvre chose est enceinte ?
Pauvre et enceinte. Ce n'est pas incompatible mais c'est chiant.
La mère n'osa pas le regarder dans les yeux, alors elle le regarda dans les oreilles, mais ceci s'avéra peu pratique et fatigant que d'osciller d'un côté de sa tête à l'autre, à cause de cette maladroite géographie capitale. Elle décida d'abandonner cet exercice difficile. Elle alla même jusqu’à l'idée d'abandonner la pièce. Mais elle abandonna cette idée et n'abandonna que les oscillations. Arthur regarda sa femme avec l'insistance.
Je te somme de me dire de quoi il s’agît, de me tout dire, j'ai droit de savoir ce qui se passe ici. Parle ! Accouche !
Non papa, c'est moi et puis c'est trop tôt ! s'écria sa fille, elle était aussi la fille de la femme, de sa femme, leur fille, quoi.
C'est qui le père ?
Père, le père n'est pour rien, il ne le sait, même, pas.
Et toi ? Tu étais au courant ?, dit-il à la mère de sa fille à sa femme donc.
Personne n'était au courant. Même pas le père, c'est dire. Enfin elle le savait, tout de même, elle-même ?
Tu es, donc, la seule à le savoir ?, dit-il à la fille de sa femme, à la sienne aussi, vu que ... bon, ok, ok …
As-tu pensé aux conséquences ? As-tu une idée comment t’en sortir, as-tu une solution ?
La fille réfléchit pendant un bon moment puis pendant un mauvais et finalement, après un deuxième bon moment répondit :
Oui, mais je ne m'y connais pas trop. J'ai vu un frigidaire avec trois étoiles qui fait aussi congélateur et c'est moins cher. Alors, j'hésitais...
Faut pas hésiter, ma fille, un congélateur c'est assez cher et si le frigo que tu as vu fait le congèle aussi alors on va prendre celui-là. On n'a pas beaucoup d'argent et puis pour une débutante comme toi, ça ira comme ça.







Vita cane


Ma chienne Belle dressa ses oreilles, quitta la place à mes pieds et se dirigea vers la porte d’entrée de notre appartement. Quelques instants plus tard quelqu’un sonna. L’homme, que je vis en ouvrant la porte, tenait un dossier bleu entre ses mains. Son regard se leva de la page gauche de son dossier ouvert et se posa sur moi.
Bonjour, dit-il, je suis Monsieur Dondo Herzog de Salinas ! Dondo Herzog de Salinas du service municipal ‘’ crotte enlevée, commune embellie’’.
Il prit ma surprise pour une inquiétude.
Ne vous inquiétez pas, monsieur…
Il chercha mon nom sur son document, le prononça à peu près correctement et continua.
Nous travaillons avec plusieurs associations dont une, concrètement celle de ‘’S. O. S. nos chiens, traitons les bien’’, a retrouvé votre chien perdu…
Il trouva le nom du chien sur le document, le prononça très correctement et continua :
Je suis délégué pour vous faire signer ce formulaire après quoi vous pouvez récupérer votre animal.
Attendez, attendez Monsieur …
Dondo Herzog de Salinas. ! Dondo Herzog de Salinas du service communal, à votre service. Je vous expliquerai le procédé à suivre.
Il répéta mon nom sans le chercher sur sa page, toujours ouverte.
Mais, si vous m’invitiez à entrer je me sentirais mieux accueilli en tant que représentant de l’administration de la ville. Merci.
Il entra sans attendre mon invitation.
Entrez s’il vous plait ! Asseyez-vous !
Déjà assis, il posa son dossier ouvert devant lui, à côté du manuscrit sur lequel je travaillais : Vita cane !
C’est une vie de chien !
Dondo Herzog de Salinas me montra la chaise en face de lui.
Une vie de chien que de s’occuper des dossiers des chiens perdus ou abandonnés. Ceci ne s’adresse pas, seulement à vous. Malheureusement, vous n’êtes pas le seul. Signez, ici s’il vous plaît !
Je n’ai pas abandonné aucun chien, monsieur Dondo Herzog de Salinas.
Belle reniflait les jambes de son pantalon.
Belle, laisse le monsieur tranquille. Ne renifle pas son pantalon. Un pantalon, même bon marché, le long des jambes d’un représentant du pouvoir local c’est un uniforme. Presque. Arrête, Belle ! Non Monsieur, je n’abandonne pas mes animaux et d’ailleurs …
L’homme au pantalon d'une uniforme presque enleva ses lunettes de soleil de marque et m’offrit la vue de son visage anobli par une expression de tendresse maîtrisé pour ses administrés et luisant d’une intelligence aigue entièrement mise à la disposition du supérieur hiérarchique.
Si vous aviez lu ce document et puis si vous l’aviez signé, précédant votre signature par ‘’lu et approuvé’’, comme je vous invitais, vous auriez pu noter que cet acte ne parle que de ‘’ chien perdu’’ et ne spécifie pas ‘’abandonné’’. Par contre, votre conscience et vous, c’est quelque chose d’autre. Ceci ne concerne pas l’administration qui régit la vie de la ville. Signez, s’il vous plaît.
La belle journée ensoleillée du mois de mai, frémissante du printemps, sous les arbres vert intense, le long de notre rue était toujours : une belle journée ensoleillée du mois de mai, frémissante du printemps, sous les arbres vert intense, le long de notre rue. Il y a une demi-heure j'avais le sentiment que la vie était belle et agréable. Ce sentiment fut, maintenant mis sous quelques conditions : signer cet acte, dire au revoir et fermer la porte derrière le représentant d'une crotte enlevée commune embellie.  Très officiel, très serein, incontestable il me tendit son stylo. C'est ici, signez !
Alors, j’ai signé. L’administration de notre belle ville a eu ce qu’elle voulait : ma signature. Moi, j’ai eu un chien retrouvé que je n’ai pas perdu. Je n’ai pas d’autres chiens que Belle. Monsieur Dondo Herzog de Salinas me donna mon exemplaire de ce document, plia et rangea avec soin le sien et il prit son portable.
Dondo Herzog de Salinas, allez y. On peut venir !
Je tentai encore une fois une explication désespérée marchant derrière le représentant du pouvoir local. Dondo Herzog de Salinas ne m’écoutait pas. Il ouvrit la porte et je vis un pompier entrer portant une grande boîte. Belle accourut et renifla la boîte. Resté seul, j’ouvris la boîte et je vis un chien, plutôt petit, plutôt bâtard. Il ne bougeait pas. Je regardai la page que je venais de signer. Mon nom, mon adresse, date du jour, le chien de race : inconnu, trouvé sans vie dans la rue, le nom de ma rue, devant le n°, le mien. Belle reniflait le petit chien mais, il ne bougeait pas. Trouvé sans vie ne veut pas dire grande chose. Ça n'explique même, pas s’il a faim ou pas ou soif. Je sorti la gamelle de réserve de Belle et y mit une ration suffisante pour un chien de sa taille. Avec ou sans vie la taille d'un chien vous dit combien il peut manger. Plus au moins.
Belle dressa ses oreilles et se dirigea vers la porte d’entrée de notre appartement. Quelques instants plus tard quelqu’un sonna. L’homme, que je vis en ouvrant la porte, tenait un dossier bleu entre ses mains. Son regard se leva de la page gauche de son dossier ouvert et se posa sur moi.
Bonjour, je suis Arnold Weiss Enger !
Il prit ma surprise pour une inquiétude.
Ne vous inquiétez pas, monsieur…
Il chercha mon nom sur son document, le prononça à peu près correctement et continua.
Nous travaillons avec plusieurs associations dont une, concrètement celle de ‘’S. O. S. nos chiens, traitons les bien’’, a retrouvé votre chien perdu… Je suis délégué pour vous faire signer ce formulaire après quoi je procéderai à la vaccination dudit chien.
Il prononça son nom sans regarder son dossier.
Attendez, attendez Monsieur …
Arnold Weiss Enger. Je vous expliquerai le procédé à suivre. Il répéta mon nom sans le chercher sur sa page, toujours ouverte.
Mais si vous m’invitiez à entrer, je me sentirais mieux accueilli en tant que représentant de l’administration de la ville. Merci.
Il entra sans attendre mon invitation.
Entrez s’il vous plait ! Asseyez-vous !
Déjà assis, il posa son dossier ouvert devant lui, à côté du manuscrit, sur lequel je travaillais : Vita cane !
C’est une vie de chien !
Arnold Weiss Enger me montra la chaise en face de lui.
Une vie de chien que de s’occuper des dossiers des chiens perdus, et abandonnés. Ceci ne s’adresse pas, seulement à vous. Malheureusement, vous n’êtes pas le seul. Signez, ici s’il vous plaît. !
Je n’ai pas abandonné mon chien, monsieur Arnold Weiss Enger, mais avez-vous remarqué quelle belle journée ensoleillée du mois de mai, frémissante du printemps, sous les arbres vert intense, le long de notre rue nous avons ?
Pardon ?
Une très belle journée, monsieur Arnold Weiss Enger. Où dois-je signer ? Ne changeons rien, la vie est belle … Belle viens, baisse ta culotte, c'est ton vaccin …
Arnold Weiss Enger enleva ses lunettes de soleil de marque et m’offrit la vue de son visage anobli par une expression de tendresse maîtrisée pour ses administrés et luisant d’une intelligence aigue entièrement mise à la disposition du supérieur hiérarchique. Belle, sentant le danger se cacha dans la cuisine.
Ne vous inquiétez pas. Nous la remmènerons à la raison. Finalement c’est pour son bien, et plus important encore : c’est obligatoire ! J’ai signé pour elle, alors elle comprendra. Je vous propose de commencer par le petit chien livré par vos services à peine cinq minutes avant votre arrivée dans nos vies.
Son instinct de chasseur des chiens de chasse et autres animaux vaccinables, son seringue tel une lance dans sa main, il parti vers la cuisine chercher les chiens. Un cri triomphant annonça que la cible avait été atteinte. Le petit chien se débâtait mais l’expérience d'Arnold Weiss Enger eu raison de lui. Les deux chiens vaccinés le vétérinaire officielle communal m’adressa un sourire signifiant un état de satisfaction presque charnelle.
Venez, je vais vous établir un certificat.
Il sorti un formulaire, y entra religieusement quelques signes sacrés, des mots, des chiffres et il le signa. Je vis le prix à payer. Ah quand même !
Monsieur Arnold Weiss Enger, permettez-moi, s’il vous plait, une observation. Vous m’avez compté deux vaccins, deux interventions.
Absolument.
Le petit chien que vous voyez jouer avec l’autre, d’ailleurs ils ont, tous les deux, l’aire d’avoir oublié leurs piqûres, vous avez le geste léger, félicitations, ce petit chien, donc a été trouvé sans vie d’après votre service. Alors ne croyez vous pas que son vaccin devrait être gratuit ou plutôt qu'il n'aurait pas du être fait?
Absolument. Puis-je voir le document ?
Absolument.
Il lit le document et à la fin il eut comme un sursaut.
Ah ! C’est monsieur Dondo Herzog de Salinas, en personne, qui vous a visité ? Je vous conseille de  bien préserver ce document. Il vous ouvre les droits à la gratuité pour toute intervention vétérinaire, tout les médicaments et aux d’autres produits de soins canin, à vie vue qu'il a été trouvé sans vie. Officiellement!
Il sortit un autre formulaire, le signa. Les mêmes donnés comme le précédent mais je bénéficie, déjà de mes droits, donc je n'ai que le vaccin pour Belle à payer.
Le fonctionnaire est parti, Belle est son nouveau copain jouent à côté de moi, Je peux continuer mon travail sur : ''Vita cane''.





Lève-toi et marche


Je marche.  Je ne veux pas courir sinon ils verront que je marche. Ce que je veux c’est qu’ils voient que je m’arrête. Que j’abandonne.
Je marche pour m'arrêter. Autrement ça ne marche pas. Je ne peux pas m'arrêter si je le suis déjà. Il faut que je marche. Marcher et non courir. Si je cours ils peuvent voir que je marche.... donc je marche. Je crois que je suis élégant quand je marche. Je crois, mais ne croyez pas que je marche pour ça. J'ai fait mon choix : je marche pour m'arrêter ! Enfin pas seulement. Marcher c'est bon pour la santé même si tu veux tout arrêter. C’est plus noble quitter le tout en bonne santé. Ok, j'arrête !
Mais ce n’est pas facile de s’arrêter. S’arrêter comme ça. Et voilà, halte, je me suis arrêté !
Enfin, si, c’est facile. Techniquement. Mais je veux qu’on voie, qu’on se rende compte que je me suis arrêté. Je veux que les gens s’arrêtent eux aussi, que les gens soient choqués, que tout le monde arrête sa respiration. Que tout le monde me regarde ! En silence, les yeux grand ouverts. D’abord, quelques larmes. En silence. Puis quelques sanglots. Puis des voix effrayées. Puis à genoux. Tous. Ou presque tous. Beaucoup. Enfin quelques-uns. Allez quelques-uns ce n’est pas beaucoup. Cent, dix, cinq ? Sinon … pourquoi ? Pourquoi j’ai marché Quatre ? Quatre ça fait deux couples. Un ? Un comme un couple ou comme un un ? Bon, bon. J’accepte. Je l’accepte cet un. Je m’accepte et je suis à genoux. Je pleure. Je sais pleurer fort. Pour deux. Je crie. Je peux crier fort. Pour trois, voir pour quatre. !
Écoutez au moins !
Les pas. Les pas en cadences différentes. Les pas, les pieds, les chaussures. Les tallons hauts, les petites sandales, les tennis de toutes tailles et couleurs. Les pas légers en 36 et les pas lourd en chaussures sarcophages 46 et plus. D’origine noble comme Prada, Gucci, Hugo boss et puis les modestes de halles aux chaussures.
Bizarre cette perspective ! Les gens ne sont pas si grands que ça même si je suis à genoux.
Je pleure, mais je n’ose pas crier. Comme j’ai voulu faire, comme je le disais. J’ai honte. Mais il le faut. Sinon je me suis arrêté pourquoi faire? Comme ça : moi, simplement à genoux, personne ne s’arrête, personne ne me regarde. Rien. Zéro. Nulla !
Allez ! J’y vais. Je pleure et je crie.
Hé, hé et mon cul c’est du poulet ?
Je n’ai même pas vu l’homme qui m’a adressé ces paroles. Une femme se penche et me regarde.
Où avez votre chapeau ? Enfin, ce n’est pas grave.
Elle laisse une pièce devant moi et s’en va.
T’as pas honte ? Tu peux pas aller travailler comme tout le monde ?
Un commerçant ne veut pas de moi, à genoux et en larmes. Les passants passent.
Mais ce n’est pas ça. Putain, mais que m’arrive-t-il ? Pas la peine de rester comme un con ici. Faut que je me lève !
Lève-toi et marche !
Mais justement, j’allais le faire … et en plus ça me dit quelque chose cette expression … attendez, attendez, ce n’est pas, mais c’est, oh seigneur …
Oui ?
Je disais que j’allais le faire et puis …
Lève-toi et marche !
Ce n’est pas possible ! Tous ces gens s’en foutent de moi et le voilà Lui. L’auteur de ce joli impératif : lève-toi et marche ! Je ne regarde plus. Les yeux fermés je me lève, je nettoie un peu mon pantalon au niveau des genoux. Je me dresse, je me retourne, je m’en vais. Ce n’est, peut être, pas poli de s’en aller comme ça, sans dire un mot ? Sans merci. Mais … merci pourquoi ? De m’avoir ordonné : lève toi et marche ! First of all, je ne suis pas paralytique et si je me trouvais à genoux et si pleurais c’était mon choix. Pour la dame rien à dire, la pièce était bonne. Avec elle on peut s’acheter de la bière pour deux bonnes, grammes par litre ou bien une assiette dans une auberge fréquentée par les pauvres ou par les ouvriers. Mais ce n’est pas la dame qui me suit maintenant. Ce ne sont pas ses pas que j’entends dans mon dos. Ni le commerçant. En me voyant partir il est resté le sourire aux lèvres.
Je marche. Je marche sans me retourner. Je marche comme, au début, comme quand je marchais pour m’arrêter. Je ne sais pas pourquoi il, pardon, Il me suit, mais je n’aime pas. Et si je m’arrêtais et si je lui disais, en me retournant, directement dans la barbe que je ne crois pas, qu’il n’existe pas et que ça n’a pas de sens de me suivre, ce n’est pas la peine de me suivre. Et puis, finalement, il s’imagine quoi, celui là? Faut arrêter de se prendre pour bon Dieu. Parfaitement ! Justement quand on l’est ! Et qu’il n’espère pas m’entraîner dans une discussion théologique… Rien à faire. Je le dis dès le début. Pas de débat, ni debout ni à genoux. Ni assis. Assez !
Que faire ? Accélérer et le semer ? Oui, tiens, marcher plus vite que … et quoi encore ? Alors, ralentir ? Regarder un peu les vitrines, faire style de s’intéresser pour les produits de beauté exposés … C’est idiot mais je raccourcis mes pas et je Le sens à mes côtés, à mon niveau. Tiens il n’est pas plus grand que moi. Bon, c’est clair, il peut se donner la taille, la forme qu’il veut, mais là, je suis content, en ce moment, où nous marchons ensemble je fais pareil et si je marchais un peu plus sur mes pointes, je le dépasserais. Bon Dieu, plus grand que bon Dieu !
Je marche. Nous marchons ! Je préfère le dire comme ça, au pluriel, vu que c’est avec Lui que je fais ce pluriel. Donc : nous marchons ! Mais sincèrement … si je pouvais continuer seul … Mais comment faire ? Lui dire : ce fut un plaisir, à la prochaine alors, au revoir, et s’en aller? Je ne peux pas faire ça. Et si seulement Il me parlait. Non, Il ne dit rien, ne me regarde pas. C’est à qui de lier la conversation entre un Dieu et un homme ? Nous marchons. Et là, je vois un homme à genoux sur le trottoir. Il pleure. Il crie. Comme moi tout à l’heure. Les gens passent. Quelqu’un lui dit de dégager et d’aller bosser. Une femme lui donne un ticket restaurant.
Hé, hé et mon cul c’est du poulet ? dit un homme en noir et s’éloigne.
Je ne fais plus attention si l’Autre est à mes côtés. Je m’adresse à l’homme à genoux.
Lève-toi et marche ! Il me regarde, surpris, mais ne dit rien.
Lève-toi et marche ! Ne me regarde pas comme ça. Je sais, je sais ça te dit quelque chose. Ne cherche pas. Fais ce que je te dis, c’est tout. Il se lève, nettoie un peu son pantalon à la hauteur des genoux, me regarde. Sa voix est calme.
On y va ?
On y va !
Nous marchons lentement. Il se retourne.
Et ton copain ?
Qui ? Ah oui. Il a d’autre chose à faire.
Et puis il n’existe pas.



Le retout des couilles

Dimanche dernier tout a changé.
Normalement, jusqu'à là personne ne me disait.
Bonjour !
Normalement je ne répondais pas.
Bonjour!
Dimanche dernier tout a changé. Comme avant personne ne me dit.
Bonjour.
Mais, là, ce dimanche personne n'avait plus de visage. C'était étrange et c'était même rigolo. Oui,rigolo,mais moi-même ? Mon visage ? Est-ce que, moi, le mien je l'avais toujours ?
Je quitte la rue de l'église et aussi je quitte le pas calme et lent d'un baladeur de dimanche .Je cours pour me voir dans la vitrine de la boutique de mode.
Je ne sais pas si j'ai un visage. Dans la vitrine à ma place, à la place où mon reflet aurait dû apparaître un Totem !
Plutôt un vrai et non comme décoration.
Certainement un vrai. Une décoration dans une boutique de mode fermée depuis cinq ans n'a pas trop de sens.
Un vrai Totem non plus, mais un vrai c'est un vrai.
Je touche mon visage, mais je ne sens que de l'air et aussi, un peu comme du duvet, doux et chaud
Ni nez ni menton.
Attention ! Peut-être que le sang a disparu dans le Monde, aussi ! Pas de sang pas besoin du nez.
Sans sang on ne sent.
― Bonjour !
Quelqu'un passe à côté de moi et me dit:
― Bonjour !
Dommage, je ne saurai jamais qui c'était.
Il n'a pas de visage.
― Bonjour, bonjour !
Sans visage d'accord, mais il a osé me dire.
― Bonjour.
Ce dimanche tout a changé. Les visages ont disparus.
Pas de visage et, voilà, que les couilles annoncent leur existence. Sans visages on a plus de couilles pour dire :
Bonjour ! 



Osez


Je suis comme tout le monde. Enfin pas du tout, mais cette histoire a besoin de ce lieu commun donc : je suis comme tout le monde et comme vous je connais la situation comme celle-ci : Vous marchez. Vous êtes partis, disons chercher des nouilles, ou bien le dernier roman de la rentrée. Je vous conseils ''Tueur en Mairie'', mais bon, c’est mon avis, c’est mon roman aussi, mais vous faites comme vous voulez.
Il fait beau, vous avancez d’un pas élégant, souple, mais décidé vers le centre-ville. La librairie ainsi que le marchand de quatre saisons se trouvent dans le centre. Le bistrot ‘’Au bon coin’’ aussi. Ce bistro n’a rien à faire ici, mais il est dans le centre-ville. J'en parle pour respecter cette évidence géographique. Vous marchez, donc vers le centre-ville et tout d’un coup vous voyez un visage qui passe à côté de vous. Bien sûr le visage est porté par un corps se terminant par une tête dont, donc ce visage fait partie intégrante. Le visage passe au rythme des pas imposés par ce corps qui porte la tête et le visage qui nous intéresse, qui nous surprend plutôt. Vous connaissez ce visage. Vous l’avez, déjà vu. Plusieurs fois, même. Vous l’avez vu sourire, vous l’avez entendu vous parler. Vous en êtes sûr, mais vous ne pouvez pas dire de qui, il s’agit. Le nom de ce visage, du visage avec le reste d’ailleurs, de la personne entière vous échappe. Vous ne pouvez pas vous rappeler. Oh, je sais que vous connaissez l’effet de ce manque, de cette impossibilité de mettre un nom sur un visage. C’est insupportable. C’est une souffrance. Vous faites tout ce que vous pouvez pour y arriver, pour vous rappeler, mais rien à faire. Ca plante, ça coince, ça bloque quelque part. Vous voulez penser à autre chose, vous ne voulez plus chercher, mais ça ne marche pas. Vous ne pouvez pas vous débarrasser ni de ce visage, qui traverse, déjà le passage piéton derrière vous ni de l’effort que vous faites pour vous en rappeler. Vous vous dites : bah ça va me revenir. Vous regardez les jupes des femmes se balancer autour de leurs corps mais rien à faire, vous y revenez : mais qui est-ce, mais comment s’appelle–t – il déjà ? Et que faites-vous pour vous en sortir ? Rien ! Moi, c’est pareil ! Rien ! Et pourtant, faut réagir ! Je l’ai fait, j’ai réagi. Un jour ...
Je marchais. Moi, c’était les nouilles, j'ai déjà le roman. Je l’ai écrit. Bon, c’est tout. Et là, soudainement, tout d’un coup je vois un visage que je connais. L’homme passa en parlant avec une jeune et belle femme à ses côtés. Sa voix m’était familière, elle aussi, mais je ne pouvais pas me rappeler ni de son nom ni d'où je le connaissais. Je ne pouvais pas me souvenir. Et là, pour la première fois je me suis dit : attends, tu vas pas, encore te torturer en cherchant le nom de cet homme. Va et demande-le-lui ! Merde ! C'est la solution ! C’est simple. Il faudrait se tourner, accélérer ses pas se rapprocher et poliment aborder la personne :
Bonjour ! Excusez-moi, je vous ai vu passer et comme je crois, comme je suis certain, même de vous connaître mais votre nom m'échappait je me suis permis …
Je me suis retourné, j'ai accéléré mes pas, même que j’ai couru. Une fois touché son épaule, une fois devant lui je me suis entendu dire :
Bonjour ! Excusez-moi, je vous ai vu passer et comme je crois, comme je suis certain et là, tout d’un coup son nom m’est revenu et j’ai continué comment allez-vous Monsieur Destouches ?
Oh bonjour, il sourit, merci et vous même ?
Oh, je vais bien, et votre épouse va-t- elle bien. Ma femme me dit souvent : Oh ! Comme elle est charmante Elsa Destouches. Et c'est vrai! Et votre fille Anne et sa petite chienne, sa petite Rouspète ?
Oui, je me suis entendu dire ça et j'aurais du dire ça mais je ne l'ai pas fait. Je n'ai pas couru après lui, j'ai préféré continuer à me tourmenter, en cherchant la réponse à la question : mais, bon sang, qui était cet homme qui vient de passer là ?
Les nouilles que j'ai achetés étaient d'assez modeste qualité, d'assez modeste goût, mais nous en avons fait un repas agréable en famille. Tout le monde était de bonnes humeurs. En cachette, ma fille a donné une bonne partie de sa part à son chien qui les mangeait avec beaucoup de plaisir et beaucoup de bruit sous la table de la salle à manger que ma femme et moi, nous étions mis à une rude épreuve à ne pas éclater de rire tout en faisant semblant de ne rien entendre ni rien voir.
Tiens, Elsa Destouches a téléphoné. Elle m’a dit que son mari avait rencontré quelqu’un qui te ressemblerait beaucoup. Aujourd’hui même.
Attends, attends, je l’ai vu et même …
D’accord, ma femme ne m’écoutait pas, on peut voir des gens qui nous font penser aux d'autres gens, mais je trouve que c'est très étrange de voir quelqu’un qui te ressemblerait dans une ville si loin puisque il téléphonait de Japon où il se trouve pour son voyage d'affaire…
Je n'ai rien dit. Je me suis retourné vers notre fille :
Anne, va faire une promenade avec Rouspète.
La petite chienne Shi-Tzu comprit et battait sa petite queue. Elle ressemble, vraiment a un petit lion ce que Shi-Tzu veut dire en japonais, en langue du pays de soleil levant .





Mohr à Venise


L’homme à l’entrée de l’exposition ‘’Dessins et gravures de Rembrandt'' était grand et costaud. Je lui présentai ma carte d’artiste. Il n’avait rien contre la gratuité d’entrée que cette carte procurait à son titulaire. Mais un titulaire plus grand et plus costaud que lui-même, réveillait quelques soupçons. Pas de mèche pour être écrivain, les cheveux pas assez longs et décoiffés pour un éventuel musicien, pas de barbe de peintre. Une moustache seule ? Peut-être mais pas une, comme la mienne collée sur un visage souriant entre deux épaules larges à une hauteur d’un mètre quatre vingt quinze. Il n’aime pas. Il ne dit rien. Je prends ma carte, passe à côté de lui :
Merci jeune homme.
Moins grand et moins costaud mais plus âgé, il n’a pas aimé merci jeune homme, non plus.  Je sentis son regard dans mon dos.  Mon portable se mit à sonner. Rondo Veneziano !
C’est interdit ! Vous devez sortir pour téléphoner ! Mon sourire s’élargit en sortant. Histoire de lui dire que l'exercice de son pouvoir de gardien ne me gênait pas.  Une fois dehors je répondis.
Allo, oui ?
Pronto, pronto ! Aspeta un momentito …
Une voix essayait de se faire entendre à travers des fritures, à travers des bruits d’une rue, parasitée par mille étincelles sonores, oscillant de crescendo jusqu’à se perdre presque totalement. Finalement, le son s’éclaircit sur une ambiance vive d’une ville.  Les pas, les voix des passants et soudain, les cloches d’une église. La voix devint claire.
T’entends les cloches ? Les cloches de St Marc ? C’est génial ! Non ?
Ah, oui, c’est phénoménal. Mais quelles cloches ? Quel St. Marc ?
St. Marc sur la place du même nom et où veux-tu que ça soit sinon à Venise ?
Bien sûr, suis-je bête, mais je ne vous savais pas là-bas et puis qui êtes-vous ?
Écoute, bien, écoute maintenant !
Les cloches sonnaient. Je les entendais clairement. J’imagine que la femme a dû tendre son bras avec son téléphone portable vers le campanile au-dessus de la place St. Marc à Venise. J’avoue, j’étais impressionné.
J’entends très bien, c’est superbe, vraiment mais avec qui je parle, qui êtes-vous.
T’as entendu ? Je coupe, je t’appelle plus tard encore, faut que je recharge mon portable.
Je remis le mien dans la poche de ma chemise. Mon copain, à l’entrée prit une position centrale dans l’entrée. Il me barrait la route.
Vous n’allez tout de même pas me réclamer ma carte encore ? Je viens d’entrer et de sortir pour téléphoner. ― Je me souviens très bien de vous, de votre carte et de sa validité.
Sa validité ?
Absolument ? Sa validité ! Elle vous donne le droit d’une visite pour une personne pour toutes les expositions de l’année courante. Une visite, une ! Que vous venez d’effectuer, justement. Une visite brève, il est vrai, mais c’était votre choix.
Ce n’est pas vrai. Je hallucine ! Vous n’allez pas me compter ces quelques instants à peine comme une visite ?
Si. Ce fut une visite. Brève, il est vrai, mais le choix vous appartenait: visiter ou téléphoner.
Je me dirigeai vers lui décidé de le pousser à côté au prix d'un bras cassé, s’il fallait. Le sien. Il fléchit un peu ses genoux, prit la position d’un taureau décidé de déchiqueter en morceaux le torchon rouge que je représentais pour lui désormais, même si ce torchon lui était supérieur d’une vingtaine de kilos. La situation sentait la poudre.
Monsieur est avec moi. Bonsoir.
Une jeune femme, grande, brune, belle en robe blanche tenait une invitation dans la main et la proposa. Le taureau la prit, l’examina attentivement et ne pouvant pas cacher sa déception murmura :
Invitation pour deux personnes. Il hésita, un peu, puis il s’écarta.
Venez, me dit la femme.
Merci, merci … jeune homme. Mon sourire effleura le visage sombre du taureau déçu.
Merci à vous, m’adressai-je à la dame en blanc, marchant à côté d’elle.
Nous entrions dans la première salle de l’exposition et elle baissa sa voix.
Je vous en prie. Je n’ai rien contre que les mâles s’affrontent mais pour les choses plus nobles.
Renverser une dictature …pour une femme ?
Par exemple, accepta-elle avec un sourire. Vous êtes Italien ? Excusez-moi, mais j’étais derrière vous pendant que vous parliez au téléphone et sans le vouloir j’ai entendu votre italien de côté de Rome, je dirais.
Mais, je ne parle pas l’italien. Il est vrai que la personne à l’autre bout du fils se trouvait en Italie, à Venise, mais nous parlions en français.
Italien, italien, accent romain, mais bon c’est votre vie privée.
De nouveau mon téléphone, mis en vibreur s’agita m’annonçant un appel.  Je le pris et répondis, tout bas.
Oui …
Ciao, passe-moi Saskia.
Qui ?
Saskia, la fille à côté de toi, la fille en blanc.  Avec le chapeau.
Elle n’a pas de chapeau.
Faut lui en acheter un. Pense-y ! Passe- la moi, maintenant, s’il te plaît.
J''ai voulu rire, demander qui il était ou simplement raccrocher, peut- être.  Mais non,  je tendis ma main avec le téléphone à la fille.
C’est pour vous.
La fille prit le téléphone sans se montrer surprise. Son visage tourné vers moi était, en partie caché par l'ombre de son chapeau. Non, non, c'est vrai, elle n'avait pas de chapeau mais je l’imaginais avec un.  Elle était belle. Je l'entendus  parler. Je ne compris rien sauf qu’elle parlait hollandais. Elle me rendit le portable.
Vous avez un bonjour de la part de van Koops.
C'est très gentil, merci, mais je ne sais pas qui est van Koops. Comme l’italien je ne parle pas hollandais, non plus, alors je n’ai rien compris.
―  Si vous n’avez rien compris c’est parce que vous étiez absent, et non à cause d’un hollandais que nous ne parlions, d'ailleurs pas mais le français. Regardez Alex !  Calmez-vous. Van Koops m’a dit, bonjour à Alex Mohre. Regardez Alex !
Elle me montra le dessin dans la vitrine, devant nous. Je le connaissais. Un dessin de Rembrandt. Un paysage hollandais avec un couple d’amants cachés, dissimulé dans les lignes et les ombres sous un énorme chêne.
Il nous faudra faire comme eux. Se cacher pour téléphoner à cause de votre jeune homme sévère à l’entrée, dit-elle voix de complice.
Ne vous faites pas de souci. Je connais un petit restaurant italien, sympa et près d’ici, alors pour nous cacher, on pourrait ...
Dommage.
― …
Dommage parce que ceci était possible : Ne vous faites pas de soucis. Nous pourrons téléphoner en riant à haute voix, danser et chanter en regardant les gondoles qui passent en attendant les douze coups de minuit de St.Marc avant d’aller rejoindre notre chambre chez Danieli.   
Mon portable vibra encore,
Allo, oui !
Trop fort. J'ai répondu trop fort. J'ai encore eu le temps d'entendre les cloches de St. Marc. Deux fois! Avant le troisième coup, le taureau me l'arracha.
Vous ne respectez rien ! Je vous le rendrai votre portable à la sortie.


A la sortie le gardien me rendit mon téléphone. 
Sans rancune ? Je ne fais que mon travail.
Au revoir, lui dis-je, comment vous appelez-vous ?
Aldo.
Au revoir Aldo.
A peine dans ma main le téléphone vibra. J'ai écouté le message. J'ai raccroché.
Saskia. Une réservation a été effectuée pour nous. Ce n’est pas Danieli mais c’est un hôtel non loin du Rialto.
C’est plus sage, dit la fille, c’est moins cher.
Notre séjour à Venise dura une semaine. Ce fut la semaine la plus folle de toutes les semaines de cette année, de toutes les semaines de toutes mes années. Ce fut la semaine la plus longue de l'histoire de Venise.
C'était la semaine qui bouleversa le calendrier. Elle comptait plus de nuits que de jours et les jours redoublaient leurs passages. Chaque matin un nouveau chapeau pour Saskia l'attendait sur la table à côte de sa tasse à café.
En quittant notre hôtel pour prendre le vaporetto mon portable sonna. Rondo Veneziano.
Oui, allo. Merci …
Le vaporetto démarra. Je tenais le portable au-dessus de ma tête.
Saskia, dis-je, c’est Aldo. Il nous transmet un bonjour de la part de Van Koops et il nous souhaite un bon retour. Je lui fais entendre les cloches. Elle sourit. Son regard suivit mon bras levé.
Ding .... ding ....






Dessine-moi un mouton

Ce n'est pas ma faute d'appartenir à une génération passée d'une génération perdue à une génération vendue. On dit, d'ailleurs que toutes les générations l'étaient pourries; certaines envoyaient les bandes armées se battre pour la tombe de quelqu'un qui n'était pas vraiment mort. Certaines se sacrifiées pour une société plus juste. La génération bourrée de lsd et d’autres condiments de ce genre proposaient la happiness nommée ''peace and love"! Il était toujours assez facile d’influencer la foule, les cons, les jeunes, tout ça mieux connus sous le nom : la génération!  Oui, mais nous ne sommes pas seulement influencés, nous sommes vendus ! Nous c'est le pognon ! My kingdom for the pognon! Le pognon macht's moeglich ! Moi avec du blé c'est moi entouré de la meuf. De la blonde, de la rousse, de l'Arabe, de black avec ou sans papier. Moi le connard sapé Cerruti, moi avec une smart de frime devant chez moi, avec une Benz tous terrains dans le garage ? Alors je bosse, je défends bec et ongles mes 15 minutes à l’écran, ma redac, la croupe de ma secrétaire.  Je bosse pendant que mes intelos vomissent les red bulls et les scotchs-soda de la nuit dernière.  Tôt le matin je sors pour aller travailler.
La semaine dernière, tout les matins il y avait un mouflet  qui m’attendait devant chez moi avec toujours la même proposition débile :
Dessine-moi un mouton !
Je passais en vitesse, un sourire aux lèvres, une idée de gifle à l'esprit.
Ce matin, en sortant de ma maison j'ai vu le garçon avec un bloque sous son bras. Ça y est, il va foncer vers moi avec son dessine moi un mouton, comme si les temps des petits princes n'étaient pas abandonnés derrière nous, oubliés. Et puis non, Ce matin rien du tout. Le garçon ne bougea pas, ne dit rien. Il me regardait indifférent. Tant mieux, pas de sourire, pas de gifle, je n'ai pas à m'expliquer, pas maintenant, pas de temps, je te le ferai demain. Je lui fit un signe amical en allant vers ma voiture et puis, intrigué, je lui dis :
Qu'est ce que tu as dans ton bloc ? Des dessins ?
Oui.
Ce sont tes dessins ?
Oui.
Je peux voir ?
Il me les montra et ce que j'ai vu me coupa le souffle. Ses dessins étaient magnifiques, surprenants.
C'est, vraiment toi qui as fait ça' ?
Oui, bien sûr, dit-il et referma son bloc.
Je peux les voir, encore une fois ?
Une autre fois, on m'attend!
Il sourit et partit.
Attends, attends !
Il se retourna.
Dessine-moi un mouton !




Ya des jours comme ça


Il y a des jours comme ça. Il y a des jours quand je pense que c’est mieux d’être où ce n’est pas vrai. C’est plus facile d’être seul et triste dans une ville, dans une maison où tu n’es pas pour de bon. Ce qui est con c’est que tu ne peux pas exprimer ta satisfaction, le dire ouvertement, oh que je suis content d’être où je ne suis pas, on se sent à l’aise, on est bien quand on n’est point, ne trouvez-vous pas ? On te prendra pour un imbécile ce qui est toujours désagréable même là-bas.
Je ne sais pas si je me suis fait bien comprendre. Ne vous forcez pas parce que quand on comprenait c’est encore plus dégelasse.   Une autre possibilité pour combattre les moments comme ça consiste à éviter les jours comme ça, les jours avec le désir d'être ou tu n'es pas vraiment. C’est facile à dire et pas facile à faire car c’est têtu les jours. Ils sont connus sous leurs noms respectifs lundi, mardi, il y en a sept  et ils y tiennent d’être ce qu’ils sont, lundi mardi, ils sont sept. Ce n’est pas facile, voir c’est impossible à convaincre un lundi, que vous voulez éviter de ne pas venir quand c’est son tour.   C’est pareil avec un mercredi ou n’importe quel autre jour de la semaine. Ou du mois. Ils sont têtus. Et c’est comme ça depuis le moment où on les a mit en fonction. Et ça date. On peut dire que c’est comme ça depuis une belle lurette. La belle lurette n’est pas un moment, une date et encore moins un moment historique. C’est une expression. 
Alors pour les éviter, ces jours là il faut jouer avec le temps. Si, par exemple je sens que le jeudi prochain sera un jour ou on dira il y a des jours comme ça, je n’y vais pas. Je reste chez moi ou ailleurs et je le laisse venir ce jeudi sens  y aller. Je vous conseille le même comportement. Ne dites pas : je suis resté dans mercredi. Non ! Ils y iront vous chercher. Ne dites rien et attendez que ce jeudi avec lequel vous n’avez pas de meilleurs rapports se passe et qu’il passe. Après c’est du passé et le passé est plus facile à maitriser que le présent. Le futur ne pose pas de problème, je n'y crois pas. Et puis, quand il vient, s'il vient on verra bien.
Il y a aussi des jours où, dès le matin vous vous en foutez de ce qu’il est ce jour, un lundi ou un vendredi, vous ne pensez ni être où ce n’est pas vrai ni à vous cacher dans le temps, ou autre chose. Pas du tout. Ce jour quelqu’un vous a parlé, quelqu'un a prononcé votre nom :
Bonjour …. Albert, Alphonse, Bernard, Brient, Bosco, Carl, Charles, Diégo, Donald, Marc, Malcolm, Pierre, Patrick …



Citta aperta


A mon arrivée sur un site de ce genre, j'ai eu de la malchance et les premiers textes que j'ai lus étaient vraiment mauvais. Comment ça mauvais? Et les notes alors, les 10/10, les 20/20, les applaudissements, les larmes, les mercis etc. ?
Mauvais te dis-je, crottique !
Attends, respire, fais le tour autour de la piste. Impressionne ! Fais des connaissances. Musik bitte ! Slow. Fascination, par exemple, mais jazzy. Dance with me baby ! Viens, dance avec moi. Chich to chick !
Love me tender ... write so sweet.
Chick to chick, kif to kif?
Ouais ... kif me.
Every body loves some boddy. Les lettres, des bons, des mauvais, les belles phrases, tais-toi et dance …
Netlectura.
Netlectura, Citta Aperta.
C'est un peu comme dans un village. Un peu et beaucoup.
Comme dans une ville. The streets. La strada ! Ultima ! The blues. Les rues, les amours. Les balcons dans les cours. Oh Romeo? Pourquoi es-tu Romeo. Copulons Capuleti ! Comment ça Cassouleti ? Tu te prends pour qui?
Montrez quoi ?
Montrez qui ?
Ah, monter, ok !  Ok mais monter quand ? Trop tard, les rosignols s’annonce.
Una citta aperta Les rues avec des chiens, avec des gens qui promènent les chiens qui laissent des crottes. Les crottes, donc laissées par les chiens dans les rues fréquentées par les gens qui promènent les chiens qui laissent ... bon, ok, ok...
Dans notre village, dans notre ville il y a des rues propres. Pas de crottes, pas de chiens. Les trottoirs sont bien là, mais personne ne fait de trottoir, pas de putes, pas de gens qui peuvent aller aux putes, donc, personne ne cherche des putes, pas de pas des gens qui promènent leurs chiens ou leurs femmes.
Il y a un pont par là? Et un virage ? Sinon, ça ne va pas. Les putane se trovano dove la curva. Ecco. Pour le pont, sais pas, peut être mais alors ce sont des pontane.
La ville sans crottes est-elle une vraie ville ? La vie dans une ville sans putes a-t-elle le droit d'être vécue ? Les femmes promenées par leurs hommes avec ou sans chiens diront : oui ! Oui mais ce ne sont pas elles qui vont aux putes … quoique.
Les crottes sont gardées, sous vos applaudissements. Vos textes, les crottes. Sous vos applaudissements. Aussi sans. Il y a des puissants qui pensent être puissant sous vos applaudissements. Entre deux standings ovations ils vous disent ''couché'' si tu touches une crotte qui leur est chère. Chère sous vos applaudissements. Les chiens qui passent à la laisse ne se couchent pas. Ils savent. On s'adresse à toi, toi qui parles de la médiocrité à travers son applaudissement à lui ? Et ta sœur ? La première pute des rues sans putes. Médiocre !!
On trouve des bons, très bons textes. Sans vos applaudissements. En silence. Dans les rues abandonnées. Les auteurs suicidés ou assassinés hantent nos esprits.
― La ferme !! Bon débarras !! Et quoi encore ?
Pane et circenes !
Le quartier résidentiel réservé pour les membres du cercle des poètes recyclés vit une très belle vie dans le calme et le respect réciproque. Le gazon tondu autour. Les chants des coqs et des troubadours. L'alexandrin et la prothèse. Vers et verre.
Il y a de touristes qui passent, tentent une gloire artistique et partent laissant leurs textes encrottés et les racontent ailleurs dans un cyber bistrot.
Il y a des trimestres, des trimestriels, des ménestrels, des stèles et des mines. Il a des listes 10/10/10/10/10/10. Les décades. Il y a des mots. On lit. On écrit. On s'amuse. On l'appelle. Elle fait la gueule, la Muse. Et puis elle couche avec un de nous. Il y a des jaloux. Mais on reste, on est des copains, des amis ... Tu parles, on n'est rien mais condamnés d'être ensemble, on ne peut pas autrement. Enfin si.
Il y a une sortie. Tu sors. Il fait froid dehors.
Mark Levy et les best Sellers rigolent.
― Ca va le libre ?
― Ben …
― Bien sûr, bien sûr …




Linguistique


Je ne sais pas pourquoi je cherche un soutien, pourquoi je me
 sauve dans les pensées formées dans une autre langue,
avec des mots d’une langue que je connais pourtant, moins bien que, ma propre langue.Je n’ai  jamais voulu  chercher les origines et  les raisons de ce comportement enfoui dans un coin de mon
 subconscient.
Depuis la découverte de l’existence d’autres possibilités de
 s’exprimer qu’en sa langue maternelle, je fais cette escapade, et ce, dès qu’une situation m’effraie, me trouble ou m’excite un peu plus. Il m’arrive, quelquefois, d’y aller juste pour donner un peu plus d’importance à une soirée en famille ou d’éviter de m’endormir lors d’une discussion intellectuelle, fort appréciable mais longue. Je sais que certains de mon entourage pensent et disent que je ne fais que mon intéressant, mais c’est faux. La fuite, le plus fréquemment se faisait, lors de ma scolarisation, vers l’anglais, probablement à cause de l’influence des filmes avec Marilyne Monroe.
Ayant été assez timide, dès que je me trouvais en présence des filles, surtout en présence de celles qui me plaisaient, autant dire toutes je partais dans toutes,
 je partais dans :
― Ah du liebe Zeit, was soll der Teufel !
Bien sûr que c’est de l’allemand,  mais à l’époque, je connaissais mal l’anglais alors, je le faisais par un relais, par l’allemand que je traduisais après, à l’aide de mes ''Essentially English ''.
Et c’est ainsi que, ma vocation est née. Les langues, la traduction, l’écriture. Construire des ponts ! C’était comme ceci que je sentais la traduction. Du plus loin que, l’on remonte dans l’histoire, la traduction, sève nourricière des langues et des cultures, existe. On a toujours eu besoin de courroies de transmission entre les peuples de langues et de cultures différentes. La traduction n’est pas seulement le passage d’une langue à une autre pour en  assurer la compréhension, c’est aussi une œuvre de civilisation et de progrès. Sans la traduction des œuvres grecques, indiennes et persanes, la civilisation musulmane n’aurait pas pris son essor, et sans les traductions des œuvres arabes en latin, puis dans les langues européennes, la révolution scientifique et technologique du monde moderne n’aurait pas eu  lieu. Aujourd’hui, on traduit non seulement les livres mais aussi les films et les séries américaines. La langue n’est plus un frein, on peut communiquer librement, échanger des connaissances, établir des contacts…
Naturellement, on ne peut pas parler toutes les langues mais on peut, on doit les considérer  comme des êtres vivants.Les langues naissent, grandissent, se développent, mais elles peuvent mourir aussi. Elles peuvent s’éteindre, même si le peuple dont,elles  furent la langue maternelle, ne disparaît pas.
Il y a quelques semaines, lors d’un voyage d’étude en Russie, j’ai été invité à tenir une conférence sur le thème ‘’L’intercompréhension entre les langues de même origine’’, dans un petit village de l’Oural.. J’ai été surpris que le Ministère de la Culture Russe
organise  le voyage d’une vingtaine de linguistes spécialisés du
Monde entier dans un village de soixante-six  habitants et si loin,
 de Moscou. On m’a donné une explication surprenante. La langue parlée dans ce village officiel était, bien sûr, le russe mais entre eux, les villageois utilisaient une autre langue dont, les origines ne
pouvaient pas être établies. Il ne s’agissait pas d’une ethnie, les
gens de ce village étaient d”origines différentes.
Comment est née cette langue. D’où vient - elle ?
Le village, Stepkowo était accroché telle une grappe de
raisin, autour d’une source d’eau jaillissant d’une falaise et
déversant des tourbillons de gouttes et d ’écume qui formaient,
quelques dizaines de mètres plus bas, un courant sauvage, et plus
loin, encore, une petite rivière Mlavaya. Toutes les maisons étaient entourées de jardins, bien entretenus, avec beaucoup de fleurs mais je n’ai pas vu d’animaux comme on voit, dans tous les villages. Même pas de chiens.
En entrant dans la salle préparée pour ma conférence, le
Président de l’Institut des Études des Langues rares, me prit par le bras et me dit de ne pas m’étonner de l’absence des traducteurs.
―Ne vous posez pas de question. Exprimez - vous en français ou en une autre langue, de votre choix. Vous serez compris.
Je n’ai rien dit, je n’ai rien compris. Sommes-nous en présence de
soixante-six polyglottes ? Dans un pays grand comme la Russie, on peut facilement en trouver autant et beaucoup plus encore, mais quel serait le but de vouloir nous emmener jusqu’ici pour nous les montrer ?  De toute façon, je m’exprimerai en français comme je l’avais prévu. Ce que j’ai fait. Ce que j’ai fait, au départ, tout au moins. L’intérêt et les réactions spontanés des auditeurs, les murmures, les rires soutenus, les applaudissements m’encouragèrent et je passai brutalement à l’anglais, puis je revins vers le français. Quelques phrases plus loin, ce fut l’allemand. Rien ne changea. Les même regards attentifs, les mêmes sourires, quand il fallut, les mêmes visages des gens qui vous écoutent et qui apprécient vos propos. J’ai osé quelques dialectes que seulement peu d’experts peuvent comprendre. Le langage des descendants de tribus
slaves isolés dans deux villages des montagnes Apennins en Italie et romanisés depuis longtemps. J’ai osé quelques histoires très érotiques des Chergars, j’ai lancé des mots et des commandes hurlées d’un bout à l’autre d’un radeau par les rameurs sur la sauvage Drina, la rivière entre la Bosnie et la Serbie. Les gens de ce village me suivaient sans problèmes. Ils me comprenaient. Le dernier doute s’envola, après la conférence, quand ils vinrent vers moi me féliciter, me remercier et me poser des questions. J’étais content d’avoir réveillé un tel intérêt  pour ma thèse et j’étais surpris par leur connaissance du français. Voronin, le Directeur de l’Institut me dit :
― Non, ils ne parlent pas français. Ils s’expriment en sagovor, leur langue locale mais vous l'entendez et vous le comprenez comme le français! Parlez-leur en allemand, en anglais ou toute autre langue … et vous verrez. En effet, j’ai fait l’expérience et ils me répondaient en …  ils me répondaient en sagovor mais je les comprenais en français, en allemand ou en une autre langue, avec laquelle la question, la conversation fut commencée. J’ai proposé d’acheter, d’emporter une documentation, les livres, tout ce qui est nécessaire pour apprendre cette langue sagovor. Voronin sourit et me dit :
― Il n’y a pas de problème, vous les aurez, mais ce ne sera qu’un cadeau, un cadeau-souvenir, vous n’en aurez pas besoin. Vous la parlez, vous la connaissez et vous la maîtrisez déjà, la langue de sagovor. Venir ici était suffisant.
― Tout le monde, chaque personne, qui vient dans ce village, l’apprend par sa simple présence  ici  même ?
― Oui, nous n’avons  pu expliquer ce phénomène, mais c’est un fait. On ne sait rien d’autre. Enfin, si, les habitants du village déconseillent l’écriture en sagovor. Ceci pourrait avoir des conséquences imprévisibles.
Dès mon retour en France , je fus pris dans un tourbillon de
 conférences, d’ invitations à différents colloques, à des  mariages et des anniversaires et je n’ai donc même pas eu le temps de réfléchir à mon étrange séjour, dans ce village de Stepkovo, pour analyser cette mystérieuse langue de sagovor.  Finalement, je me suis donné quelques jours de vacances. La campagne. Les promenades avec mes chiens le long de la rivière. Le jardin. Je revivais. Et puis, je revivais, dans mes pensées, ce voyage en Russie.  Pourquoi serait - il déconseillé d’écrire en sagovor ? La meilleure réponse ne serait - elle pas de le faire ? Écrire en sagovor ! Oui, mais comment écrit on en sagovor ? Décrire un événement ou un moment vécu dans ce village, dans Stepkovo en n'importe quelle langue que vous connaissez serait écrire en sagovor, m'avait dit Voronin, Alors je me suis mis à écrire, à décrire mon séjour dans ce village. Tout en écrivant j'ai entendu quelqu'un parler dans mon jardin. Ma maison est assez isolée et je n'attendait aucun visiteur. Le facteur était déjà passé. Il ne peux avoir personne dehors et pourtant j’entendais clairement les voix, plusieurs voix même. Intrigué, je sortis.
― Tiens, le voilà, tu peux lui poser la question toi-même.
― Oui, c’est ça, il connaît la réponse parce qu’il est humain ?  Ou parce que c’est ton maître?
 Mes deux chiens, face à face, se disputaient. Un peu plus loin Socquette mon chat parlait au chat du voisin.
― Les chiens, ça ne changera jamais. Ils se disputent parce qu’il ne sont pas d’accord, s’il y avait d’abord la poule ou s’il y avait d’abord l’œuf, tu te rends compte ?
― On est plus calme en hiver.  En Afrique, personne ne parle que du soleil, dit l’hirondelle en s’envolant du garage.s’envolant du garage.
― Ils n’ont qu’à demander à la Sandra , elle devrait le savoir.
―Sandra, c’est une poule et elle a une cervelle de poule, alors …
Je ne bougeais pas, je regardais autour de moi. Le bruit devenait de plus en plus fort. Les voix se  mélangeaient, tout le monde parlait en même temps.





Nègre


Vero me regardait comme d'habitude, avec inquiétude.
― Al ! Si tu continues de t'exciter comme cela on n'arrivera à rien.
― Sinon on arrivera à quoi ? A écrire des nouvelles, un roman que les éditeurs s'arracheraient ?
― Peut-être que non, peut-être que oui, mais si on ne fout rien certainement pas.
― T'as une idée, toi ? Une idée pour nous sortir de l'anonymat ? On court tout nus à travers Paris et on distribue nos dédicaces à gauche et à droite. ? Le veau d'or …
―Tiens, pas mal ça !
― Pas mal ? Tout nus ? Jamais …
― Mais non, mais non, le veau d'or ... et si on se donnait un pseudo Alf et Verov ?
― J'arrêtai mes cent pas nerveux, je la regardai :
― Alf et Verov ? Tu fais allusion aux auteurs russes Ilf et Petrov ? C'est génial mais c'est n'importe quoi. On te prend, déjà, pour mon nègre, alors si on se déclare deux …
― Alors, que je ne suis que ta négresse-tigresse.
Elle fit le geste d'une attaque féline de ses deux bras dressés vers moi. C'est un de ses jeux de séduction.
― Tu me voulais calme ? Je veux bien essayer, mais alors ne me propose ce genre de solutions.
Promis ! Promis juré, je ne te présenterai aucune proposition plus, mais que ne compte pas sur moi pour te faire tes corrections, non plus. Pas de corrections alors personne ne poura dire que je suis ton nègre, ta Petrova, ta Verova. Rien, je ne fous plusrien pour toi. Cherche-toi un autre, une autre pour te les corriger tes manuscrits, cherche-oi un autre nègre ou mieux encore va devenir nègre de quelqu'un, moi j’arrêt et si tu veux savoir …
Non, je n'ai pas voulu savoir. Je ne pus entendre la suite, je suis sorti claquant la porte derrière moi. Je ne voulais pas entendre la fin, je la connaissais. Je courus vers la voiture.
Je roulais sans savoir où j'allais, sans vouloir savoir ou j'allais. Je roulais au hasard. Au hasard des feus verts, au hasard de la circulation. Je roulais longtemps. Très longtemps.
Finalement, après des heures, après des jours, peut être, je ne saurai pas le dire sauf que je n'ai pas vu les nuits tomber ni les jours se lever, fatigué, épuisé même, je me suis arrêté dans une rue calme. Il n'y avait pas de voiture. Il n'y avait personne. J'ai quitté ma voiture et je marchais. L'air frais d'une soirée agréable me faisait du bien. Je marchais et marchais. Longtemps, très longtemps. Je n'ai vu que quelques personnes passer au loin ou de l'autre côté de la rue. La légère brise qui me venait à l'encontre sentait la montagne, les vacances, l'enfance.
Un chien sortit d'une cour et s'avança vers moi. Il sautillait devant moi de gauche à droite et de droite à gauche ce qui en langue des chiens veut dire viens jouer avec moi. Acceptant je bougeais mes bras autours de sa tête. Il se mis à aboyer et moi à rire. Un homme vint vers nous et appela le chien. Le chien ne se tourna même pas vers son maître. Celui-ci se mit à rire et me dit :
― Écoutez, comme il voudra plus quitter son nouveau copain, vous, le mieux serait d'entrer dans la maison, il vous suivra et après …
Il me parlait en anglais. Je fus, un peu, surpris, mais je me dirigeai vers l'entrée de la maison. Pourquoi me parlait-il en anglais? Peut-être que parce qu'il l'est. Il y a, même, des Roms dans notre ville. J'ai joué, encore un peu, avec le chien dans l'entrée de la maison et puis je voulus partir.
―Voilà, le petit chien est chez lui, maintenant je peux m'en aller. Au revoir.
Je parlais anglais, moi aussi. Je connais assez bien cette langue mais mon accent laisse à désirer. Pourtant, l'homme, assez bizarrement habillé, d'ailleurs, me comprit. Plus que ça, il m'invita à rester un peu et boire un verre avec lui. Pourquoi pas, cette rencontre commençait à m'amuser. L'homme avait des cheveux longs, une barbe. Sa maison n'avait pas d'électricité. Peu importe, moi, aussi, j'ai connu des moments difficiles avec mes factures. Je pris le verre qu'il me tendait. Whisky. Un bon. Très bon. Un deuxième verre. Le troisième, nous l'avons pris assis dans son bureau. Etrange son bureau, plutôt rustique, mais je le trouvais beau. Il y avait des feuilles et des feuilles de papiers partout. Sur son bureau, sur les étagères en bois allant jusqu'au plafond, en bois celui-là aussi, Même les chaises étaient recouvertes de feuilles de papier, de feuilles de textes, de manuscrits dans le sans littéraire du mot. Mon hôte était assez bavard, il me parlait de ses hobbys, le théâtre en première ligne si j'ai bien compris. Verre après verre on se confiait et même, qu'on a connu des moment forts et que nous nous sommes mis à chialer d'émotion quand on a constaté que l'écriture était ce qu'on aimait le plus. Le petit chien dormait quand on a ouvert une deuxième bouteille, non, non, il s'est endormi seulement à l'ouverture de la troisième. Le mec m'a dit son nom, mais trop compliqué. Quand il me proposa de nous tutoyer, j'ai accepté, ça va de soi, mais, putain, comment on se tutoie en anglais. Peu importe, j'ai compris : c'était du vieux anglais. Tant mieux j'ignorais que je pouvait le comprendre.
― Je peux voir ce que tu écris, Chakey ?
Il a failli tomber en se tournant et faisant le geste : tout ça
― Non ?
― Yes, yes, vas voir un peu, tiens prends ton verre ?
Je regardai et je feuilletais ces tas de papiers. Tout d'un coup je redevins sobre. Je me sentis rougir, je me sentis pâlir. Je tenais les manuscrits de : ''Henry VI'', '' Richard II '' , celui de '' La comédie des erreurs''. Je tenais les manuscrits de '' Titus Andronicus'', de ''La Mègere apprivoisée''. Quelques feuilles me glissèrent entre les doigts tremblants et tombèrent au sol. Je les ramassai et en les montrant je lui dis:
― Attends ? Attends ? Tu fais une collection d’œuvres de qui tu sais en manuscrit, tu les collectionnes, t'es collectionneur,c'est ta pation,c'est ça ?
― De quoi tu parles ? Quoi de qui je sais ? J'écris pour the Royal Theatre et tu y trouveras les pièces pas encore jouées ?
Attends, comment as-tu ... comment avez-vous dit que c'était votre nom.
Il était mort de rire, mais il le dit. Je suis resté assis, sans bouger pendant un long moment. Puis je continuai à chercher parmi ses papiers. Il me versa, encore, un verre.
Tiens, prends ton verre, mais tu cherches quoi, Al ?
Je lui dis le titre. Il se tut. Je me suis mis à lui parler de l'histoire de cette pièce. Il a trop bu, le titre ne lui dit rien, pensais-je.
Ah, non, je n'ai pas ça, je n'ai pas écrit une histoire comme ça mais c'est intéressant. Une belle histoire d'amour. Viens, mets-toi ici et écris-moi ça. Tiens, ton verre.
Je me suis mis à table et une plume, une vraie, à la main j'écrivais. Il regardait et, de temps en temps il me tapa sur l'épaule, signe qu'il aimait. Je ne sais pas combien de temps j'ai mis, mais je l'ai fait. En quittant la maison et laissant le manuscrit que je venait de terminer, le manuscrit de ''Romeo et Juliette'' sur son bureau, Chaqespeare dormait et ronflait.







Ose-moi




Je t'offre ce matin habillé en rêve
Je déchire, m'oublie dans ce moment, porté par le tourbillon de tes désirs
Je vole vers nos halètements bestiaux
C'est en entrant dans ce matin d'une couleur plus belle que toutes les prières
Que tu te dénudes, que tu me forces, que tu m'affoles de tes obsessions de moi
Si je nage, si je me noie si je viole tes pensées
C'est pour me sentir maître de ton corps
C'est pour t'obéir en esclave puissant
J'obéis à ta paralysie d'interdit exigeante, j'épouse tes fantasmes, je t'invente, je touche ta bouche
Est-ce ta voix ou ma folie?
Ose !
Tu palpites, tu m'invites, tu es ivre, tes yeux me prient : ordonne !
Ouvre tes lèvres, ferme tes yeux !
Ton envie de fuir m'enivre, je l'étouffe dans ta gorge
Mes doigts dans tes cheveux te limitent
Je te lâche : reviens !
Tu m'acceptes profond
Tes lèvres sur mes veines entendent le sang vibrer
Tu voyages
La terre n'est plus là où je suis
J'entends le monde s'effondrer
Je me sens m'effondrer
Ose !
Tes ongles tracent mes cuisses
Je te colle contre mon ventre
 Tu m'arraches les vagues chaudes de moi
J'explose dans ta soumission
J'envahis ta bouche 
Reste
Ne me libère pas
Monte ton regard
Attendons le retour del primo matino del Mondo






Tu veux ma photo ?


Je n'ai jamais voulu mourir.
Ne me dites pas, s'il vous plaît, mais personne ne veut mourir.
First of all, votre opinion on peut s'en passer, on s'en tape. Et puis, je vous en prie, personne ne boit comme moi. Si personne ne veut mourir c'est qu'ils ont peur de boire. Et de mourir.
Je n'ai jamais refusé un verre. Je n'ai jamais eu peur de boire.
Je n'ai jamais voulu mourir.
Je ne suis l'ami de personne, membre d'aucun groupe, d'aucune secte, d'aucun gang, d'aucune réunion de rebelles, de pseudo-rebelle.
Je n'ai jamais joué au foot. Si, une fois mais j'étais bourré.
Je me suis vu dans un miroir. Dans les toilettes du tabac en face de la Gare du Nord.
Je me suis vu dans le miroir.
Tu veux ma photo ?
Il disait rien. Je lui ai hurlé, encore la même chose dans la gueule, puis je lui ai craché dessus. Il s'est retourné et il est parti.
Je me suis vu dans le miroir.
C'est ça, dégage connard! Va-t-en ! Tu crois que ton sourire m'attriste? Que je vais chialer à cause d'un peu de crachat sur ta sale gueule de minable de merde, tais-toi, tais-toi …
C'est là où j'ai voulu être un peu mort, mais sans plus vu que je l'étais,  déjà, peut-être.








The target


Frenchy, ouvre ton enveloppe.
La même voix comme d'hab.
― Done.
― Tu vois ton chèque signé? Ton prix sera le nôtre.
― Pas de photo, pas de nom ! Sur qui est le contrat ?
― Sur le responsable de tous les malheurs dans le monde, sur le responsable du Monde, tout court.
― A Manhattan ? Et comment je le verrai ? C'est pas sérieux. J' y crois pas !
― Au contraire  il faut croire ! Si tu crois, tu le verras. Ne réfléchis pas trop. Just do it !
On raccrocha.



Il est cinq heures. Tôt le matin, on ne voit pas bien. Et la lumière fut. Je L'ai vu.
Au coin de la Columbus avenue et W 96th street. devant Joy's bar. Il se retourna et puis, il disparut! Disparut de ma vue, sinon il ne peut pas disparaître. Vu qu’Il est éternel. Et c'était à moi, maintenant, de couper l'éternité! Un petit coup pour un homme et un immense coup pour l'humanité. Chez Joy's ? Dès que j’ai franchi la porte, je l’ai vu. Il était le seul client . Mais ce n’était pas Lui.
― Bonjour ! L’avez-vous vu ?
Ma question s’adressait en même temps au barman et au client. Ils se taisaient, tous les deux. Indépendamment, mais dans un silence commun.
― Bon Dieu ! Dites-moi, simplement, si vous l’avez vu. Bon dieu, l’avez-vous vu ?
― Mais qui ? L’avons-nous vu qui, bon dieu ?
― Oui, Bon Dieu !
― Ma foi, non. Il paraît qu’il n’existe pas, alors le voir, pas évident, pas vraie Belzy ?
Le barman riait. Belzy partageait son opinion, souriant ironiquement, sous son chapeau noir genre peintre de plein air. Il avait un étrange éclat dans ses yeux.
― Il est ''the target''. Je le cherche pour lui poser la question s’il existait ou pas. Si oui, je peux finir mon job. Sinon tant pis. Comme je l’ai vu entrer… tiens le voilà, il traverse la rue.
― Cours-lui après, dit Belzy, le café est pour moi.
― Merci !
Les gens marchaient dans les deux sens, le long du trottoir. Je courais le regard fixé vers le passage commercial, de l’autre côté de la rue, dans lequel, Il pénétra au moment même où, la porte du ''Joy's bar''coupa le rire de Belzy en se refermant, dans mon dos.
Quelqu'un me prit le bras. Une dame me souriait. Ce sourire a du avoir un charme de séduction redoutable, il y a six ou sept décennies.
― Aidez-moi à traverser la rue, jeune homme.
― C’est que je suis très pressé, moi. D’accord, mais alors vite fait.
Je l’ai portée en courant .
― Merci, le Bon Dieu vous le rendra.
― Pour ça, faudra, encore, que je le rattrape, madame.
J’étais à l’entrée du passage et je crus Le voir pénétrer dans un coffee bar de l’autre bout, à la sortie du passage. Je m'y dépêchai et dès que, je franchis la porte, je l’ai vu et j’ai su, que ce n’était pas Lui.
―Un café. Avez vous vu Bon Dieu.
―Pourquoi dites-vous Bon Dieu ? On ne dit jamais Mauvais Diable. Que diable ! Ou bien : le Malin, Belzébuth, Lucifer. Pourquoi nous impose-t-on cette habitude linguistique. Avec Dieu, ce qu'il y a de terrible, c'est qu'on ne sait jamais, si ce n'est pas un coup de l'Autre.
―Arrête Belzy, on t’a demandé si tu l’avais vu. C’est tout.
― Non. L'augmentation de l’alcoolisme de 45%, deux tiers des enfants du Monde ont faim, les guerres, le garagiste s'est tiré avec sa belle-sœur. Non, on ne l'a pas vu votre Dieu. Votre café est pour moi.
Il m’adressa un sourire. Son regard avait un éclat étrange sous sa casquette de base-ball.
J'ai erré toute la journée. Dans un moment, j’ai cru le voir parler avec un couple avant d' entrer dans un yellow cab. La fille éloigna son compagnon de moi, avant que j'ai pu dire un mot :
― Viens Belzy, je n’aime pas les gens qui posent des questions bizarres.
Il me tourna le dos pour l'emmener. Brièvement, je pus voir un petit éclat étrange dans son regard.
A la tombée de la nuit, je n’avais pas envie de rentrer chez moi. Et si j’allais boire un coup avec quelqu’un ? Un homme passa.
―Hé ! Jeune homme …
ll continua sans se retourner.
―Hé ! Belzy.
Il se retourna.
―On boit un coup ensemble ?!
―Pourquoi pas ?
Il tenait une bouteille dont le cou émergeait entre ses doigts.
― Whisky, a good one. Ailey.
J'ai bu, Il était très bon, en effet.
― Écoute Frenchy, abandonne ! Laisse tomber ton contrat.
Je le regardais sans rien dire.
― Tu vois, c'est avec moi que tu es resté, à la fin de cette journée. Si tu honores ton contrat any Belzy more arround.
Il me sourit. Il y avait, dans ses yeux, une étrange lueur.





Un texte de je ne sais pas d'où


Encore visible
Est-ce un rayonnement fossile ?
Peu importe ! ANIMONS !
Il y aura-t-il des lois imposant l'oubli du passé, il y aura-t-il une nuit au soleil noir pour brûler les mots, les souvenirs
Il y aura-t-il une prière pour la porter, la murmurer le long de la rivière pour
Ce conteur
Ce veilleur d'aube
Chercheur d'un nom pour ce pays
Un pays qui n'apparaît sur aucune carte Invisible pour les voyants
Que sais-je
Peu m'importe puisque je vous lis
En tissé de verbe d'espérance...





Aphorismes décoiffés mais endimanchés


Parler avec un con, c'est du temps perdu. Se taire aussi.

Si un con sait qu'il est con c'est un début d'intelligence.

Si je me promène seul je peux rencontrer quelqu'un, si quelqu'un se promène seul, je m'en fous.

Tout le monde dit qu'il ne faut croire personne, mais personne ne le croit.
Quand une femme te pose la question ''à quoi tu penses'', elle veut dire '' à qui tu penses '' !

Il y a comme une injustice dans la vie. Jeune tu peux tout mais t'as rien, vieux t'as tout et tu peux rien.

La femme de votre vie partage, obligatoirement, votre lit mais la femme qui partage votre lit n'est pas obligatoirement, la femme de votre vie.

L'optimiste confond : ''il n'y a plus rien entre nous'', avec ''tu sens ma peau'' ?

.

Il est impossible de persuader un con qu'il l'est. Même pour quelqu'un de très intelligent.

Heureusement qu'on a des toubibs. Sinon beaucoup d’entre nous n’auraient personne devant qui se déshabiller.

Désir d'une femme ne se calme pas par la possession d'une autre.

Si je me réveillais c'était pour la regarder, maintenant si je la regarde je m’endors.

Elle ne comprenait rien de ce que je disais et elle m'aimait. Maintenant elle comprend tout mais elle aime un autre.

Quand on fait l'amour, on baise forcement et ce n'est pas forcement bien à dire mais quand on baise on ne fait pas forcement l'amour mais c'est forcement bien.









Depuis ruelle Mignonnette vers le monde